mardi 29 septembre 2009

Un travail d'école

Je vous pitch un texte écrit dans un cours de création littéraire. Le sujet: souvenir de lecture.
Ça vaut ce que ça vaut!
Enjoy it!!

Dans la maison de mon enfance, un paradis campagnard situé au milieu de nulle part, il y avait une bien triste bibliothèque. C’était une toute petite chose en mélamine, dégarnie et sans âme qui criait famine. Ma mère, pour la rassasier, la goinfrait de bibelots infects. Elle tenait tout de même lieu de pièce maîtresse dans le salon. Allez savoir pourquoi.

Il y trônait des bouquins de Guy Des Cars aux couvertures défraîchies, aux pages jaunies par le temps. Leurs présences dégageaient une aura mystique : jamais je n’aurai vu mon père ou ma mère lire Des Cars. On y trouvait aussi une quantité traumatisante de Selection du Reader’s Digest et des National Geographic, pour nous permettre de découper des images lors de travaux scolaires, une activité qui avait cruellement manqué à ma mère dans son enfance parce que, disait-elle : « On était ben que trop pauvres pour avoir des revues chez nous su’a terre ». Ma mère fait partie de cette génération qui était contente de recevoir une orange à Noël. Pour le reste, il y avait un dictionnaire amputé, parce que vieux comme le monde, des catalogues Sears et quelques bandes dessinées. Rien ici qui puisse faire passer ladite bibliothèque pour l’orgueil de la famille.

Moi, j’avais des tablettes dans ma chambre. Des tablettes bourrées de livres de tonton Walt.

C’était arrivé un matin dans la boîte aux lettres. Un petit carton multicolore nous annonçant une offre exceptionnelle! Donnez à vos enfants le plus beau cadeau qui soit; le goût des livres et de la lecture! Ma mère, qui était toujours partante pour me faire le plus beau cadeau qui soit, a coché la case Oui, envoyez-moi les 24 livres de la série Les livres merveilleux de Disney. Il faut dire qu’elle avait protégé ses arrières grâce à la clause Si je ne suis pas entièrement satisfait du produit dans les 30 jours, je peux le retourner sans problème, moyennant le coût de manutention.

Quatre à six semaines plus tard, une grosse boîte pleine de livres était atterrie chez nous. Une boîte qui fleurait bon l’encre neuf quand on se glissait le nez dedans. Oncle Walt avait tenu sa parole et m’avait envoyé un amas de classiques de la littérature, revampés à sa sauce spéciale de happy ending. J’étais aux anges, ma mère aussi; ce pour quoi elle n’a pas renvoyé le produit dans les 30 jours.

Le papier était épais et rugueux, en étant attentif, on pouvait sentir son grain entre le pouce et l’index quand venait le temps de changer de page. Je ne me tarissais pas de regarder les belles images souvent tirées de l’époque moyenâgeuse : les maisons décrépies, de la paille plein le toit, les rues pavées de pierre, éclairées par des réverbères, les princesses couvertes de voiles et de dentelles, entourées de leurs belles amies aux chapeaux pointus, les sorcières laides et jalouses dans leurs châteaux sombres, les sceaux de bois, cerclés de fer servant à la serpillière.

Je me souviens encore de cette phrase, tirée du livre de Pinocchio, qui m’avait laissée songeuse : Lampwick était un polisson. Qu’est-ce que pouvait bien être un polisson? Un mélange de poli et de poisson? Pourtant, le jeune homme représenté sur l’image n’avait rien d’un poisson? Qui plus est, il ne semblait rien avoir de poli! Ma mère consulta le dictionnaire amputé pour ce mot. Par chance, la page était toujours là. Selon lui, Lampwick n’était rien d’autre qu’un petit garçon malpropre traînant dans les rues. La définition collait bien avec ce que me représentait la scène.

L’univers des livres merveilleux de Disney a probablement marqué une flopée d’enfants québécois grandissant dans les années 80. Nous étions une sacrée bande à avoir des mères qui voulaient nous offrir le plus beau cadeau qui soit, le goût des livres et de la lecture.

Maintenant que j’ai enfilé moi-même le costume de maman, je redécouvre avec plaisir cette collection que j’ai pris soin d’aller chiper au domaine de mon enfance. Ma mère se dit que c’est probablement le meilleur investissement qu’elle ait fait de sa vie. Et il n’y a rien qui équivaut aux expressions faciales de mes gamins quand je les entraîne avec moi dans ces mondes merveilleux. Et je ne vous cache pas avoir éclaté de rire quand en lisant Pinocchio à mon grand de 6 ans, il m’a demandé : Maman? C’est quoi un polisson?

5 commentaires:

Jérôme a dit...

OOoooooooohhhhhhh full de cute!

Bravo Hani, t'as une belle plume.

K a dit...

Merci Jérôme!

hani a dit...

K? C'est qui ça K?
Moi c'est hani!
H-A-N-I

Semblerait que je me suis fait passer pour une autre...Désolé.

SoBe a dit...

Oh que j'aime, j'aime ça!

J'aimerais t'avoir dans mes cours de création, ça ferait des bons textes à entendre quand le professeur exige qu'on livre nos griffonnages en public!

hani a dit...

Bon, pas que je veux brailler là, mais eu 75% pour ce texte.

Qualité 3/5.

Bof....

Je me console quand je lis des commentaires comme les vôtres les Zamis! xx